Croissance et dépendance au pétrole
La Banque mondiale observe une reprise de 2,6 % du PIB congolais en 2024, portée par la construction et les services. Dans les rues de Pointe-Noire, commerçants et transporteurs ressentent déjà « un petit vent d’affaires », confie Nadia Mabanza, jeune cheffe d’agence de voyage.
Toutefois, le brut représente encore plus de 75 % des recettes d’exportation. Cette concentration expose l’économie aux soubresauts des cours mondiaux. Les analystes rappellent que chaque baisse de dix dollars sur le baril prive l’État de milliards de francs CFA, complexifiant la gestion budgétaire.
Gérer le capital national de façon intégrée
Le rapport du 25 septembre 2025 propose de passer d’une logique d’extraction à une gouvernance du capital global : produit, humain et naturel. « Un franc pétrolier sur trois devrait financer la santé ou l’éducation », estime l’économiste Charles Abel Kombo, coauteur du document.
Cette approche rejoint la Stratégie nationale de développement 2022-2026, qui encourage la transformation locale et la montée en compétence des jeunes. Selon le ministère du Plan, chaque année de scolarité supplémentaire peut augmenter les revenus futurs de 9 % en moyenne.
Les sept leviers d’une économie résiliente
Premier levier, la création d’un fonds souverain public-privé amortirait les chocs pétroliers et placerait une partie des surplus dans des actifs sûrs. Les pays du Golfe offrent un précédent adapté aux spécificités congolaises, assurent les experts.
Le deuxième axe vise la fiscalité non pétrolière. Le numérique permet déjà de sécuriser les paiements de TVA. À Brazzaville, l’entrepreneur Luc Iloki explique avoir déclaré ses recettes en ligne « en moins de dix minutes, sans intermédiaire ».
Troisièmement, la transparence budgétaire s’améliore avec la plateforme e-Budget accessible au public depuis janvier 2025. Les organisations de la société civile saluent un « pas concret vers la redevabilité ».
Les quatrième et cinquième leviers portent sur le capital humain et naturel. Investir dans les centres de formation technique de Dolisie et promouvoir la certification FSC dans les concessions forestières créent simultanément emplois qualifiés et services écosystémiques rémunérés.
Capital humain : la jeunesse veut des chances
À Ouesso, la lycéenne Prisca Oko rêve de devenir ingénieure dans le solaire. Elle rappelle que plus de 60 % de la population a moins de 25 ans. « Nous ne voulons pas seulement des bourses, mais aussi des stages près de chez nous. »
Le gouvernement a lancé, avec l’appui de l’UNESCO, un programme de 500 bourses techniques orientées énergies renouvelables. Les premières cohortes sortent cette année, prêtes à alimenter les projets solaires de Impfondo à Sibiti.
La Banque mondiale souligne qu’un bond de deux points du taux d’alphabétisation adulte pourrait relever le PIB de 0,4 % par an, renforçant la base fiscale et la cohésion sociale.
Forêts et finance verte, un gisement hors sol
Le sixième levier concerne la valorisation des 22 millions d’hectares de forêt. Le Congo est déjà pionnier de la REDD+, avec quatre projets labellisés, générant 1,8 million de crédits carbone échangés depuis 2021.
Les communautés de Ngombé perçoivent une part des revenus via des micro-projets : puits, écoles et coopératives de cacao. « Le carbone paie les cahiers de nos enfants », sourit le chef traditionnel Mokoka, brandissant les reçus du dernier virement.
La diplomatie climatique travaille aussi à un marché sous-régional des obligations vertes, permettant d’attirer les investisseurs en quête d’actifs durables tout en finançant la conservation des aires protégées comme Conkouati-Douli.
Un fonds souverain pour stabiliser l’avenir
Le ministère des Finances planche sur une loi créant le Fonds pour les Générations Futures, nourri dès qu’un baril dépasse un prix de référence. Les maires espèrent y voir financer routes rurales et dispensaires.
Certains économistes suggèrent de coupler ce mécanisme à une règle d’or budgétaire : chaque franc emprunté pour des infrastructures doit démontrer un rendement social supérieur au service de la dette. Le Trésor étudie cette piste, jugée compatible avec la surveillance régionale de la CEMAC.
Vers 2030 : appel à l’action collective
Le septième levier insiste sur la participation citoyenne. Radios communautaires, applications mobiles et comités de quartiers peuvent suivre en temps réel l’exécution des projets publics, réduisant les risques de déperdition.
En combinant fonds souverain, capital humain robuste, forêts préservées et climat d’affaires modernisé, la République du Congo peut bâtir une prospérité inclusive. « Nous avons la chance des ressources et désormais la feuille de route ; à nous de jouer », conclut Charles Abel Kombo.
									 
					