Une rencontre stratégique à New York
En marge de l’Assemblée générale des Nations unies, la maire de Paris Anne Hidalgo et le président congolais Denis Sassou Nguesso se sont retrouvés pour examiner un jumelage entre les deux capitales. L’échange, qualifié de chaleureux par les délégations, place l’écologie et la jeunesse au centre d’une coopération annoncée comme « concrète ».
Les deux dirigeants ont rappelé la portée symbolique d’un dialogue Nord-Sud enfin ancré sur des solutions locales. « Nos capitales partagent la langue française et des enjeux planétaires », a relevé Anne Hidalgo. Le chef de l’État congolais a salué « un partenariat gagnant-gagnant pour nos populations ».
Écologie urbaine : des solutions partagées
Paris propose de transférer son expérience post-Jeux olympiques en matière de végétalisation des rues, de fermes maraîchères sur toit et de tri avancé des déchets. Brazzaville, de son côté, souhaite valoriser son savoir-faire dans la gestion participative des forêts riveraines du fleuve Congo, atout pour la capture carbone.
Le professeur André Obami, urbaniste à l’Université Marien-Ngouabi, voit dans ce jumelage « un accélérateur pour tester des toitures fraîches adaptées au climat équatorial ». Selon lui, la modularité des solutions parisiennes doit être « réinventée avec des matériaux et des savoirs locaux ».
Pour illustrer cette adaptation, l’association Tawisa, active à Bacongo, expérimente déjà des bacs de compostage conçus en fibre de raphia. Sa coordinatrice, Mireille Makosso, espère que la synergie Paris-Brazzaville « ouvrira des micro-financements pour essaimer ces outils dans chaque quartier ».
Renforcer la voix des jeunes
Au-delà de la protection du paysage urbain, le projet cible la jeunesse. Échanges sportifs, incubateurs culturels et bourses d’études figurent sur la première feuille de route. Anne Hidalgo évoque « l’inspiration des Jeux de 2024 pour faire du sport un vecteur d’insertion ».
À Makélékélé, le jeune entrepreneur Prince Mvoula dirige une start-up de recyclage de pneus en mobilier urbain. « Si Paris nous ouvre ses réseaux, je pourrai former dix autres équipes et réduire la pollution des marchés périphériques », assure-t-il, soulignant l’appétit des jeunes pour l’économie circulaire.
Le gouvernorat de Brazzaville a annoncé qu’un comité de pilotage mixte recensera les besoins en équipements sportifs et en espaces de coworking, avant de mobiliser l’Association internationale des maires francophones pour financer les premières infrastructures.
Un levier pour l’économie verte locale
Selon la Chambre de commerce du Congo, plus de quatre-vingt pour cent des PME brazzavilloises opèrent en dessous de leur potentiel faute d’accès à la formation. Le jumelage pourrait corriger cette asymétrie en proposant des ateliers conjoints sur la certification environnementale et l’accès aux marchés verts.
L’économiste Élise Ntsolo, basée à Paris, rappelle que le segment des emplois verts représente déjà vingt-cinq mille postes en Île-de-France. « Partager ces bonnes pratiques peut inspirer les incubateurs congolais, en créant des ponts financiers et des labels communs », explique-t-elle, confiante dans l’effet d’entraînement.
La diplomatie des villes francophones
L’AIMF, présidée par la maire de Paris, jouera un rôle charnière. L’organisation dispose d’un fonds de solidarité qui a déjà soutenu des projets d’électrification solaire à Pointe-Noire et de cartographie d’adresses à Brazzaville. Avec ce jumelage, le mécanisme pourrait être élargi à des volets eau potable et mobilité douce.
Denis Sassou Nguesso, reconnu pour son plaidoyer sur les forêts du Bassin du Congo lors de la COP21, voit également dans cette coopération un moyen de renforcer la diplomatie climatique du pays. « Les villes ont désormais une voix essentielle dans la gouvernance environnementale mondiale », a-t-il déclaré, rappelant l’importance d’un multilatéralisme de proximité.
La mairie de Paris partage ce diagnostic et envisage l’envoi régulier de techniciens pour appuyer la collecte de données climatiques dans les quartiers inondables de Brazzaville, étape indispensable pour accéder aux financements du Fonds vert onusien.
Prochaines étapes et vigilance citoyenne
Les services techniques des deux capitales ont six mois pour rédiger la feuille de route finale. Parmi les indicateurs suivis : nombre d’arbres plantés, emplois créés, pourcentage de déchets recyclés et jeunes formés. Un tableau de bord commun sera mis en ligne pour assurer la transparence.
La société civile sera associée à chaque étape. « Nous veillerons à ce que la participation communautaire reste centrale », affirme Hortense Ngatsé du Réseau Ressources Citoyennes. Elle préconise la création de comités de quartier mixtes capables de suivre l’avancement et de proposer des ajustements rapides.
À Paris comme à Brazzaville, l’enthousiasme est tangible. Plusieurs ONG rappellent néanmoins que les jumelages réussissent lorsque les budgets sont pérennes et les résultats régulièrement évalués. Les deux capitales disent vouloir donner l’exemple, démontrant qu’une coopération équitable peut accélérer la transition durable sans laisser personne de côté.
