Urgence sanitaire et pression environnementale à Oyo
Sous les toits rouges d’Oyo, les soignants gèrent chaque jour des tonnes de pansements, gants et aiguilles usagés. Jusqu’ici, ces déchets étaient souvent brûlés à ciel ouvert ou jetés dans des fosses, exposant les riverains aux fumées toxiques et les nappes phréatiques aux pathogènes.
Le département de la Cuvette, traversé par de multiples rivières, redoute depuis longtemps une propagation accélérée des infections et une contamination de l’eau. L’arrivée d’un incinérateur moderne est perçue comme une réponse concrète à cette double menace sanitaire et écologique.
Visite conjointe PNUD-hôpitaux : état des lieux précis
La Représentante Résidente du PNUD, Elsie Laurence-Chounoune, a traversé le parvis de l’hôpital général Édith Lucie Bongo Ondimba pour examiner le chantier. À ses côtés, le directeur de l’établissement et la responsable de l’hôpital Maman Mouebara ont présenté plans, échéanciers et défis logistiques.
« Nous devons garantir une mise en service rapide et sûre », a insisté la diplomate onusienne, rappelant que le projet s’inscrit dans l’Objectif de Développement Durable 3 sur la santé. Un ingénieur local a ensuite guidé la délégation autour du silo principal, encore enveloppé d’échafaudages.
L’incinérateur : technologie propre au cœur du projet
Le four atteindra 1 200 °C, température suffisante pour neutraliser virus et bactéries sans émission visible de fumée. Un double filtre céramique, fabriqué à Brazzaville, réduira les particules fines de 99 %, limitant l’impact sur la qualité de l’air selon le bureau d’études.
Une capacité de 200 kg par cycle couvrira non seulement les deux hôpitaux d’Oyo, mais aussi les centres de santé périphériques. Les cendres vitrifiées, inertes, seront réutilisées comme agrégat dans la fabrication locale de briques, fermant ainsi la boucle de valorisation.
Un laboratoire de détection virale de nouvelle génération
Dans l’aile nord, le futur laboratoire BSL-2 se dote de hottes à flux laminaire, d’automates PCR et d’une chaîne froide solaire. Les échantillons sanguins pourront être traités sur place, réduisant les délais d’analyse de dix jours à vingt-quatre heures, selon le chef biomédical.
Cette rapidité est déterminante pour la surveillance des fièvres hémorragiques ou du paludisme résistant. Le ministère de la Santé ambitionne d’y centraliser les données épidémiologiques régionales, offrant un tableau de bord en temps réel aux autorités et aux chercheurs.
Témoignages des soignants et attentes des communautés
« Lors de la dernière épidémie de rougeole, nous envoyions les prélèvements à Brazzaville, et les parents s’impatientaient », se souvient Nadège, technicienne de laboratoire. Dans la rue voisine, le pêcheur Sylvain espère, lui, que les poissons du fleuve ne seront plus menacés par les seringues jetées.
Les étudiants de l’Institut de formation sanitaire d’Oyo voient déjà dans l’incinérateur un espace pédagogique. « Nous apprendrons à gérer un déchet de la chambre du patient jusqu’à sa destruction », note Carlos, en deuxième année, convaincu que cette compétence renforcera son employabilité.
Alignement avec le Plan National de Développement
Le projet répond au pilier 2 du Plan National de Développement 2022-2026, consacré à la valorisation du capital humain. Il complète les efforts du gouvernement pour doter chaque chef-lieu départemental d’une plateforme de traitement des déchets spéciaux, objectif réaffirmé lors de la dernière session parlementaire.
En matière climatique, l’incinérateur moderne réduira les émissions de méthane issues des décharges ouvertes. Un rapport du Centre national de recherche sur l’environnement chiffre le gain potentiel à 1 200 tonnes équivalent CO₂ par an, soit l’empreinte annuelle de 400 véhicules.
Financement et partenariats public-privé
Le coût total avoisine 1,8 milliard de francs CFA, selon le dossier présenté. Le PNUD apporte 55 % via son guichet Fonds pour l’environnement mondial, tandis qu’une société congolaise de travaux publics assure l’ingénierie. Une formation continue sera financée par une fondation pétrolière basée à Pointe-Noire.
Cette approche multipartite sécurise la maintenance. « Le piège, c’est le manque de pièces de rechange ; nous avons signé un contrat de fourniture locale », explique le directeur technique. La mairie d’Oyo compte lever une redevance symbolique sur les cliniques privées pour soutenir le budget.
Pharmacie centralisée : un maillon logistique clé
À côté du laboratoire, une pharmacie et un dépôt de médicaments climaticontrollés verront le jour. L’architecte a prévu des murs en blocs de terre comprimée, isolants naturels adaptés à la chaleur septentrionale. Les ruptures de stock devraient baisser de 60 % grâce à un logiciel de traçabilité.
Rapidité d’exécution et calendrier
Les travaux sont achevés à 70 %. La mise à feu test de l’incinérateur est programmée pour le quatrième trimestre. Le laboratoire sera calibré simultanément afin d’obtenir l’agrément de l’Institut national de la santé publique avant la prochaine saison des pluies.
Ressources pratiques pour les habitants
Le centre d’appel santé Cuvette : 113, disponible 24 h / 24. Pour signaler un déchet biomédical abandonné, composer le 800 444. Les jeunes diplômés désirant se former peuvent déposer un CV à la Direction départementale de la santé, avenue des Raphias, du lundi au vendredi.
