Une décision judiciaire à forte portée dissuasive
Le Tribunal de Grande Instance d’Impfondo a rendu, le 26 juin, un verdict qui s’inscrit dans la consolidation de l’État de droit environnemental au Congo. Trois ressortissants nationaux ont été condamnés à des peines de deux à trois ans de prison ferme pour circulation, détention et tentative de commercialisation d’une peau de panthère, d’écailles et de griffes de pangolin géant, trophées issus d’espèces intégralement protégées par la loi n°37-2008 du 28 novembre 2008. Au-delà de la sanction pénale, l’amende d’un million de francs CFA, assortie de trois millions de francs CFA de dommages et intérêts, traduit la volonté des magistrats de rendre le crime environnemental financièrement non rentable.
Réaffirmation de la souveraineté écologique congolaise
Par cette sentence, la République du Congo réaffirme la priorité politique accordée à la préservation d’un patrimoine faunique reconnu mondialement. Le ministre de l’Économie forestière soulignait récemment que « la biodiversité n’est pas seulement un trésor naturel, elle est un facteur de stabilité et de rayonnement pour notre pays ». Le verdict d’Impfondo s’inscrit dans la trajectoire définie par le Plan national de développement 2022-2026, lequel érige la gestion durable des écosystèmes au rang de pilier de croissance verte.
Un réseau d’acteurs au service de l’application de la loi
L’arrestation des prévenus le 27 mai, à Impfondo puis à Épéna-Centre, a mobilisé la gendarmerie, la Direction départementale de l’économie forestière et le Projet d’appui à l’application de la loi sur la faune sauvage (Palf). Ce dispositif interinstitutionnel illustre la montée en puissance de partenariats opérationnels soutenus par les agences onusiennes et plusieurs ONG. Selon un officier de la gendarmerie, « la coordination locale nous permet d’agir rapidement sur le terrain et de sécuriser les preuves nécessaires devant le juge ». L’efficacité de cette chaîne constitue un atout majeur pour attirer l’appui technique et financier des bailleurs internationaux.
Panthère et pangolin : symboles d’une biodiversité menacée
Le panthère d’Afrique centrale et le pangolin géant figurent à l’Annexe I de la Convention de Washington, interdisant tout commerce international à des fins commerciales. Leur surexploitation résulte d’une demande croissante de peaux de luxe et d’écailles destinées à la pharmacopée parallèle en Asie. Les scientifiques de l’Université Marien-Ngouabi alertent depuis plusieurs années sur le recul de ces populations dans la cuvette congolaise. La peine prononcée à Impfondo participe ainsi à la réduction de la pression anthropique sur des espèces essentielles à l’équilibre trophique des forêts tropicales.
Enjeux socio-économiques pour les communautés rurales
Dans la Likouala, département enclavé où le revenu monétaire reste limité, la tentation du prélèvement illégal demeure forte. Le gouvernement encourage néanmoins des alternatives génératrices de revenus compatibles avec la conservation, à l’image de l’apiculture communautaire ou de la transformation du manioc. Mme Odette Ndinga, sociologue spécialisée dans les dynamiques rurales, estime que « la sanction ne peut être pleinement efficace que si elle s’accompagne d’opportunités économiques licites pour les jeunes ». La mise en œuvre de projets structurants, tels que le Programme de gestion participative des aires protégées, vise à concilier besoins locaux et impératifs écologiques.
Renforcement du cadre légal et engagements internationaux
Adoptée en 2008, la loi sur la faune et les aires protégées offre un fondement juridique robuste, mais elle fait l’objet d’un processus d’actualisation pour intégrer les nouvelles directives de l’Accord de Kunming-Montréal sur la biodiversité. Les autorités congolaises collaborent avec l’Union africaine et la CEEAC afin d’harmoniser les sanctions et de faciliter les poursuites transfrontalières contre les réseaux criminels. Cette dynamique traduit une diplomatie verte constructive, conforme à la vision du chef de l’État qui prône une « économie sobre en carbone et riche en nature » lors des sommets climatiques.
Perspectives d’une gouvernance verte inclusive
Le cas d’Impfondo démontre qu’une justice forte et impartiale constitue un levier de crédibilité pour le Congo sur la scène internationale. Pour pérenniser ces avancées, les experts recommandent la digitalisation du suivi judiciaire, l’extension des formations pour magistrats et forces de l’ordre, ainsi que la sensibilisation des populations. Sans céder à un optimisme béat, la convergence entre répression des infractions, développement local et coopération internationale laisse entrevoir un modèle de gouvernance verte susceptible d’inspirer d’autres États du Bassin du Congo.