Un examen pivot pour la cohésion nationale
Moment charnière du parcours secondaire, le Brevet d’études du premier cycle (BEPC) transcende la seule certification scolaire pour s’ériger en rite républicain de cohésion. Cette année, 125 265 collégiens affrontent simultanément la même épreuve écrite sur l’ensemble du territoire, de Pointe-Noire à Ouesso. Cette synchronicité, rarement égalée dans l’espace sous-régional, rappelle que l’éducation demeure l’un des leviers les plus puissants de construction de la citoyenneté partagée.
Historiquement, le BEPC consolide la transition entre l’enseignement fondamental et le lycée, là où se façonne le capital scolaire décisif pour l’insertion socio-professionnelle. En sanctuarisant cet examen, les autorités entendent renforcer le sentiment d’équité interprovinciale : chaque candidat, quels que soient son origine sociale et son lieu de résidence, est soumis à la même matrice d’évaluation, sous le regard attentif d’un État soucieux de justice territoriale.
Un dispositif logistique inédit pour la session 2025
L’ouverture officielle, depuis le Lycée Chaminade de Brazzaville, a révélé une mécanique organisationnelle digne d’opérations de grande ampleur. Cent trente-sept centres d’examen ont été dotés d’imprimantes sécurisées, de transports scellés et d’une veille informatique permettant la remontée quasi instantanée des incidents. À Brazzaville seulement, 51 766 candidats ont été répartis selon un découpage fin, pensé pour limiter les flux et assurer la distanciation requise dans les salles.
Au cœur de ce dispositif, le ministère de l’Enseignement préscolaire, primaire, secondaire et de l’Alphabétisation a coopéré étroitement avec la Sécurité civile. La circulation des sujets, l’encadrement sanitaire des candidats et la logistique d’urgence – par exemple l’acheminement de copies de secours en cas d’intempéries – relèvent d’une planification systémique. Cette orchestration traduit la montée en compétence d’une administration éducative désormais familière des standards internationaux de gestion de masse.
La fraude scolaire, indicateur de gouvernance
Au-delà du déroulement purement académique, la session 2025 se distingue par la volonté affichée de « tarir la source de la triche », selon les mots du ministre Jean-Luc Mouthou. Le partenariat avec la Haute Autorité de lutte contre la corruption marque un tournant : la fraude à l’examen n’est plus perçue comme un simple écart individuel mais comme un symptôme systémique pouvant miner la crédibilité des diplômes nationaux.
Des brigades mixtes, composées d’agents de l’éducation et d’officiers assermentés, ont patrouillé les périmètres des centres. Les dispositifs de brouillage de signaux téléphoniques et la fouille systématique à l’entrée des salles ont considérablement réduit les cas d’usurpation ou de consultation clandestine de documents. De fait, plusieurs observateurs, appuyés par des ONG locales, constatent une décroissance sensible des procès-verbaux dressés pour irrégularités, signe que la dissuasion par la présence étatique produit déjà des effets tangibles.
Sécurité et bien-être des candidats au premier plan
Un autre pan de la stratégie gouvernementale concerne l’accompagnement sanitaire et psychologique. Des équipes médicales mobiles, renforcées par des psychologues scolaires, sont intervenues dans les centres pour prendre en charge malaises vagaux, états de stress aigu et petites pathologies saisonnières. L’objectif, explicitement déclaré, est de permettre à chaque élève d’exprimer son potentiel intellectuel sans entrave somatique.
Cette attention porte déjà ses fruits : plusieurs responsables d’établissement rapportent une baisse de près de 20 % des abandons de dernière minute, traditionnellement imputables à l’anxiété. Dans un pays où l’accès aux soins reste parfois inégal, la présence d’unités médicalisées dans les enceintes scolaires envoie, selon un proviseur interrogé, « un signal puissant d’inclusion et de considération envers la jeunesse ».
Vers une culture d’évaluation éthique et performante
Les praticiens de la sociologie de l’éducation s’accordent à dire que le combat contre la fraude ne se gagne pas uniquement par la coercition mais par la construction d’une éthique partagée. En multipliant les campagnes de sensibilisation, les autorités congolaises entendent inscrire la probité dans l’habitus scolaire. Sur les murs des collèges, des affiches proclament : « Ton succès authentique est ton meilleur passeport ».
Cet effort s’inscrit dans une vision holistique du système éducatif, où le principe de méritocratie alimente la confiance des partenaires internationaux et facilite la mobilité académique des lauréats. À terme, la vocation est claire : faire du BEPC un label reconnu, gage d’une formation rigoureuse et d’une éthique de travail intériorisée, condition sine qua non pour que la jeunesse congolaise prenne toute sa part dans les projets de développement national défendus par les plus hautes autorités.