Alors que les restrictions imposées par Washington pèsent toujours sur les ressortissants congolais, le gouvernement de Denis Sassou Nguesso mène une offensive diplomatique discrète pour obtenir la levée du « Travel Ban », réactivé sous la présidence Trump. Au cœur des tractations : ressources stratégiques, équilibres régionaux… et désormais, atouts climatiques du bassin du Congo.
Une diplomatie silencieuse, mais active
Inscrit sur la liste américaine des pays soumis à des restrictions migratoires, le Congo-Brazzaville tente de rétablir des relations normales avec les États-Unis. Depuis plusieurs semaines, des négociations sont en cours à Washington, menées dans la plus grande discrétion par l’entourage présidentiel congolais. Objectif : sortir du Travel Ban sans exposer le dossier à la surmédiatisation ou à la pression politique interne.
Un nom revient avec insistance dans ces tractations : celui de Françoise Joly, conseillère spéciale du président Denis Sassou Nguesso. Récemment aperçue dans la capitale fédérale américaine, elle mènerait les discussions stratégiques avec efficacité. Contactée, son bureau n’a pas souhaité commenter.
Ressources, alliances et contreparties
Les discussions portent notamment sur les intérêts économiques américains dans la région. Washington pourrait exiger un soutien actif du Congo-Brazzaville à l’accord régional de stabilisation des Grands Lacs, signé entre le Rwanda et la RDC, ou encore un accès privilégié aux ressources naturelles congolaises (pétrole, minerais stratégiques).
Un accord commercial bilatéral est aussi évoqué, dans un contexte où les grandes puissances cherchent à sécuriser leurs chaînes d’approvisionnement en minerais critiques.
Une diplomatie verte en renfort
Face aux exigences sécuritaires et économiques de Washington, Brazzaville mise également sur sa diplomatie climatique pour obtenir des concessions. Le Congo-Brazzaville abrite une partie essentielle de la forêt du bassin du Congo, deuxième poumon écologique de la planète après l’Amazonie. Cette forêt absorbe des milliards de tonnes de CO₂ chaque année, régule les précipitations régionales et abrite une biodiversité exceptionnelle.
Le pays joue un rôle central dans les efforts climatiques internationaux, notamment à travers son leadership dans la Commission Climat du Bassin du Congo et ses engagements pris lors des dernières COP. Cette carte verte, combinée à son potentiel de crédits carbone, pourrait renforcer la crédibilité diplomatique de Brazzaville dans les discussions bilatérales.
« Le Congo est l’un des derniers grands puits de carbone encore intacts. C’est un levier géopolitique majeur que nous devons faire valoir », explique une source proche du dossier.
Préserver la souveraineté tout en avançant
Si Brazzaville opte pour une diplomatie discrète, c’est aussi pour préserver ses marges de souveraineté, notamment face à des partenaires non occidentaux comme les Émirats arabes unis, avec qui des accords récents ont été signés dans les secteurs de l’énergie, des infrastructures et de l’agriculture.
Une visite présidentielle en perspective ?
Selon plusieurs analystes, une visite préparatoire du président Denis Sassou Nguesso à Washington pourrait être envisagée si les négociations aboutissent. Cette rencontre marquerait une étape diplomatique forte : officialisation de la sortie du Travel Ban, signature de nouveaux accords et relance d’une coopération bilatérale plus équilibrée.
Une diplomatie patiente, multisectorielle
En attendant, les diplomates congolais poursuivent leur travail en coulisses, misant sur une stratégie à plusieurs volets : sécurité régionale, économie, climat et énergie. Une démarche qui reflète l’évolution de la diplomatie congolaise vers une approche plus globale et verte, où la protection de l’environnement devient un levier d’influence internationale.