Un tournant décisif pour le paysage énergétique congolais
À Brazzaville, l’ouverture officielle des travaux de validation du programme « Électricité pour Tous » a constitué un jalon majeur dans la réforme du secteur énergétique. Présidée par le ministre de l’Énergie et de l’Hydraulique, Émile Ouosso, aux côtés de la représentante résidente du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), Adama-Dian Barry, la séance a acté la volonté partagée d’asseoir un service public de l’électricité robuste, continu et équitable. Porté par l’ambition présidentielle d’offrir l’énergie à chaque foyer congolais, le projet s’inscrit dans la stratégie nationale de développement et résonne avec les objectifs de l’Agenda 2030 des Nations unies.
Une feuille de route alignée sur les engagements internationaux
Le Congo a entrepris, depuis plusieurs années, une refonte structurelle de son secteur énergétique afin d’atteindre la couverture universelle. Le Pacte national de l’énergie, actuellement finalisé, sera présenté à la Banque mondiale dans le cadre de la Mission 300 avant sa signature à New York, en marge de l’Assemblée générale de l’ONU. Ce cadre normatif fixe l’électrification de toutes les localités de plus de mille habitants, et prévoit de connecter plus de 800 000 ménages à l’horizon 2030. Il illustre la cohérence entre les engagements nationaux et les exigences globales de réduction de la pauvreté énergétique tout en limitant l’empreinte carbone.
Des partenariats multilatéraux pour un financement innovant
Au-delà de l’appui technique du PNUD, le projet a reçu l’adhésion de partenaires clés, dont la Banque mondiale, le Fonds monétaire international et la Fondation Rockefeller. Cette architecture de financement mixte, combinant prêts concessionnels, subventions et mécanismes de levée de capitaux privés, devrait mobiliser plusieurs centaines de millions de dollars. Adama-Dian Barry a souligné que « la coordination et la synergie d’action sont essentielles pour optimiser chaque franc investi dans l’énergie », rappelant que l’électricité irrigue l’ensemble de l’économie, de l’agriculture à la santé en passant par l’éducation.
Une plateforme de dialogue pour une gouvernance inclusive
La mise en place d’une plateforme d’échanges réunissant État, collectivités locales, opérateurs privés et société civile vise à renforcer la transparence et la redevabilité. Cette instance permettra d’harmoniser la planification des infrastructures, de mutualiser les ressources et de sécuriser les investissements. Le ministère de l’Énergie entend ainsi instaurer une culture de co-construction, dans laquelle les communautés locales seront davantage impliquées dans la définition des priorités, afin de prévenir les retards de mise en service et d’assurer la pérennité des équipements.
Des retombées sociales et climatiques attendues
L’accès universel à l’électricité est souvent présenté, par les économistes du développement, comme un multiplicateur de croissance. Dans le contexte congolais, les analyses projettent une hausse de la productivité agricole grâce aux chaînes du froid, une réduction des déperditions scolaires imputables au manque d’éclairage, et un essor des services numériques en zone rurale. D’un point de vue environnemental, la substitution des groupes électrogènes diesel par un réseau plus propre, reposant sur l’hydroélectricité abondante du pays et des solutions photovoltaïques décentralisées, devrait abaisser l’intensité carbone du mix énergétique.
Vers un corridor énergétique au cœur de la sous-région
Le gouvernement mise sur la création du « Boulevard Énergétique du Congo », concept qui irrigue toute la politique sectorielle. Cette dorsale électrique, appelée à s’interconnecter avec les réseaux des pays voisins, pourrait positionner Brazzaville comme hub d’échanges d’électricité en Afrique centrale. Des études de faisabilité menées avec la Communauté économique des États de l’Afrique centrale examinent déjà les possibilités d’exportation de surplus hydrauliques vers la République démocratique du Congo et le Gabon, renforçant l’intégration régionale.
Maintenir le cap sur l’équité et la durabilité
Les observateurs s’accordent sur le fait que la réussite du programme dépendra d’une gouvernance financière rigoureuse, de capacités techniques renforcées et d’un cadre réglementaire stable pour attirer les investissements privés. Le ministre Émile Ouosso insiste sur l’importance de « faire de l’électricité un bien public accessible à tous, sans renoncer à l’équilibre économique du secteur ». Dans ce chantier, l’État entend jouer un rôle d’architecte, laissant aux opérateurs publics et privés la latitude d’innover dans la production, la distribution et la gestion intelligente du réseau. À l’horizon 2030, si les jalons posés lors de ces travaux de validation se concrétisent, le Congo pourrait rejoindre le cercle restreint des nations africaines proches de l’accès universel, tout en consolidant son positionnement dans la diplomatie climatique.