Cap sur un territoire de biodiversité capitale
Traversé par l’équateur et ceinturé par le majestueux fleuve Congo, le Congo-Brazzaville occupe une position géographique stratégique au cœur du deuxième massif forestier tropical de la planète. Plus de soixante pour cent du territoire se compose de forêts denses où cohabitent gorilles, éléphants de forêt et essences rares telles que l’okoumé. L’épaisseur biologique de ce patrimoine confère au pays une responsabilité mondiale : près de trois milliards de tonnes de carbone sont stockés dans ses sols et sa canopée, un service écosystémique que les scientifiques qualifient de « poumon de secours ».
Vulnérabilités climatiques et résilience des territoires
Le gradient climatique, du littoral atlantique soumis à la saison sèche de juin à septembre aux zones équatoriales humides du Nord, rend le territoire sensible à une pluralité de risques. Les savanes méridionales subissent déjà une accentuation des feux de brousse, tandis que l’élévation du niveau marin menace les infrastructures pétrolières côtières de Pointe-Noire. Selon le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, la température moyenne pourrait croître de 1,5 °C à l’horizon 2050 si les trajectoires actuelles se confirment, avec un impact direct sur la productivité agricole du manioc et du maïs, piliers de la sécurité alimentaire. Face à ces évolutions, les collectivités locales de la Cuvette et du Niari expérimentent des plans d’adaptation fondés sur les écosystèmes, associant reboisement communautaire et restauration des zones humides qui régulent les crues.
Stratégies gouvernementales pour une économie bas-carbone
Conscient de la dépendance historique aux hydrocarbures, qui fournissent encore plus de la moitié du PIB, l’exécutif congolais a inscrit la transition écologique dans le Plan national de développement 2022-2026. « Notre ambition est de transformer la rente pétrolière en capital naturel durable », déclarait le ministre de l’Économie forestière, Rosalie Matondo, lors du forum Investing in the Congo Basin organisé à Brazzaville. La stratégie repose sur trois leviers : l’amélioration de la gouvernance forestière – avec la certification de 2 millions d’hectares sous gestion durable –, la mise en place d’incitations fiscales pour l’agroforesterie et la montée en puissance d’un mix énergétique où l’hydroélectricité issue du Kouilou et du Chaminade pourrait représenter quarante pour cent de la capacité installée d’ici 2030.
Coopérations internationales et financements verts
Le Congo s’inscrit activement dans l’Initiative pour la forêt d’Afrique centrale et le mécanisme REDD+, bénéficiant déjà de partenariats avec l’Agence française de développement et la Banque mondiale. En 2021, Brazzaville a signé un accord de 65 millions de dollars avec le Fonds vert pour le climat destiné à soutenir l’électrification rurale solaire et à renforcer les systèmes de surveillance satellitaire des forêts. L’adhésion à l’Organisation des pays exportateurs de pétrole n’empêche pas le pays de promouvoir un agenda climatique fondé sur la « solidarité nord-sud », principe rappelé par le président Denis Sassou-Nguesso à Glasgow, où il a plaidé pour une valorisation internationale des services de séquestration fournis par le bassin du Congo.
Perspectives sociétales vers 2050
Avec une population projetée à onze millions d’habitants, dont soixante-dix pour cent résideront en milieu urbain, la planification écologique devra se conjuguer à l’urbanisme. Brazzaville expérimente déjà des couloirs de mobilité douce sur l’avenue Matsoua, tandis que Pointe-Noire teste la collecte sélective des déchets plastiques en coopération avec des start-ups locales. Les économistes estiment que la diversification vers la filière bois certifié, l’écotourisme et l’agriculture biologique pourrait créer cent mille emplois verts dans les trente prochaines années. Si le défi est considérable, la convergence des volontés publiques, privées et communautaires offre un horizon où la croissance se fait l’alliée du climat, dans le respect des équilibres sociétaux qui constituent la richesse profonde du Congo-Brazzaville.