Une ambition logistique au service de l’environnement
Lors du défilé du 15 août 2025 célébrant le 65ᵉ anniversaire de l’indépendance, la Direction générale des finances et de l’équipement a présenté un matériel militaire impressionnant. Derrière l’apparat, un message a émergé : la logistique de la Force publique peut aussi devenir un vecteur d’écologie urbaine.
Portée par la volonté du président Denis Sassou Nguesso de moderniser les services publics, la DGFE s’est dotée d’unités inédites : soins médicaux à domicile, menuiserie interne, corbillards spécialisés et, surtout, une branche assainissement qui nettoie, végétalise et sensibilise Brazzaville à la gestion responsable des déchets.
Au cœur de ce virage, le colonel-major Michel Innocent Peya, directeur de la DGFE, affirme que « le développement à la base exige la participation de chacun ». L’approche traduit une conception holistique où hygiène urbaine, santé des troupes et cohésion sociale s’articulent étroitement.
Assainissement urbain à Brazzaville
Concrètement, la DGFE a remis des engins de collecte à la mairie, désengorgé les artères Saint-Denis et Bayardelle puis installé, le long du boulevard Alfred Raoul, des corbeilles normalisées. Ces gestes simples préfigurent une politique de « ville propre » pensée depuis les forces de sécurité.
Dans un contexte de dérèglement climatique qui fragilise les infrastructures, la propreté urbaine constitue un facteur d’adaptation. Réduire l’encombrement des caniveaux limite les inondations, tandis que l’élimination des dépôts sauvages supprime des foyers potentiels de maladies vectorielles amplifiées par l’humidité.
Les militaires ne se substituent pas aux services environnementaux, mais ils apportent un volet discipliné, rapide et visible. Cette dynamique renforce la légitimité de la Force publique, souvent perçue uniquement sous l’angle coercitif, en la montrant actrice de bien-être collectif et de salubrité.
Santé des troupes et durabilité sociale
Le discours présidentiel du 31 décembre 2024 insistait déjà sur l’amélioration de l’habitat, de l’eau potable et de l’électricité dans les casernes. En élargissant ces priorités à l’espace urbain, la DGFE manifeste une lecture systémique : protéger les habitants revient à protéger leur environnement immédiat.
La création d’une unité de soins à domicile pour les soldats montre que durabilité rime avec capital humain. Un militaire rétabli plus vite consomme moins de ressources hospitalières et continue de servir aux opérations de terrain, y compris aux opérations de débroussaillage ou de sécurisation post-pluie.
Menuiserie et cérémonial : la boucle circulaire
Le volet menuiserie illustre, quant à lui, une approche de l’économie circulaire. Réparer lits et armoires prolonge le cycle de vie du mobilier, réduit les achats de bois neuf et, par conséquent, la pression sur les forêts congolaises déjà confrontées à l’exploitation informelle.
Même la fabrication de cercueils peut être perçue sous l’angle durable : la DGFE utilise des matériaux locaux, limite les importations coûteuses et garantit un suivi normatif qui évite l’accumulation d’essences exotiques, souvent illégales, sur le marché funéraire sous-régional.
L’arrivée de corbillards institutionnels, outre la dimension cérémonielle, optimise les trajets. Des véhicules dédiés, entretenus et mutualisés réduisent la multiplication de transports improvisés pourtant plus polluants. Chaque convoi devient ainsi une séquence rigoureusement planifiée, avec un bilan carbone plus lisible pour l’administration.
Professionnalisation sécuritaire et avantages climatiques
Dans la capitale, la population perçoit déjà des effets tangibles : trottoirs dégagés, dépôts réguliers dans les nouvelles corbeilles et réduction des odeurs stagnantes près du fleuve. Des associations citoyennes relatent une diminution des moustiques dans les quartiers où l’eau pluviale s’écoulait difficilement.
Plusieurs observateurs nationaux estiment que cette synergie entre maintien de l’ordre et protection environnementale pourrait devenir un modèle pour d’autres administrations congolaises. Elle démontre qu’un même investissement logistique peut servir à la fois la sécurité, la santé publique et la salubrité, sans surcoût budgétaire majeur.
Sur le plan méthodologique, la DGFE capitalise sur la discipline militaire : inventaire permanent des points noirs, déploiement d’équipes motorisées et évaluation quotidienne par reporting photographique. Cette chaîne de contrôle, déjà éprouvée dans les missions de maintien de l’ordre, est simplement appliquée aux déchets.
Selon le constat dressé par la presse nationale lors du défilé, les balayeuses et camions offerts permettent un ramassage plus soutenu des déchets solides. Les kilomètres d’avenues libérées témoignent d’une baisse visible des tas d’immondices qui jonchaient quotidiennement chaussées et trottoirs.
Pour Les Échos du Congo-Brazzaville, la prestation combinée du défilé et du repas de corps symbolise la professionnalisation croissante de la police et de la gendarmerie. L’assainissement vient ainsi parachever un triptyque santé-logistique-mémoire qui associe rigueur militaire et service environnemental.
À terme, la démarche pourrait inspirer d’autres structures publiques, voire privées, engagées dans l’émergence du Congo. Elle confirme surtout qu’en pleine transition écologique, la logistique sécuritaire, loin d’être un secteur fermé, peut contribuer de façon pragmatique à la qualité du cadre de vie urbain.