Le CESE, pivot national de dialogue territorial
Sous les lambris du Palais des congrès de Brazzaville, la présidente Emilienne Raoul a lancé la session inaugurale du Conseil économique, social et environnemental. Son mot d’ordre : replacer le territoire, première cellule du développement, au cœur de chaque avis consultatif.
Elle a rappelé que la valeur des recommandations dépend de la compréhension fine des défis vécus dans les quartiers urbains, les villages forestiers ou les plaines agricoles. « Élever les réalités locales au niveau des préoccupations nationales », a-t-elle insisté, devant ministres et partenaires internationaux.
Les conseillers ont donc adopté leur règlement intérieur et un dispositif financier, jalons obligatoires pour créer six commissions permanentes capables de suivre, carte et données en main, les volets sociaux, économiques, environnementaux, éducatifs, culturels et religieux.
Méthode : écouter, cartographier, proposer
Dès novembre, des tournées de terrain sont annoncées dans les douze départements. Objectif : interroger commerçantes de marchés, pêcheurs du Kouilou, planteurs du Niari ou jeunes artisans de la capitale afin de dresser un diagnostic participatif.
Les commissions croiseront ces récits avec les statistiques de l’Institut national pour construire des notes brèves, éclairées par des infographies lisibles. « Nous voulons que chaque citoyen comprenne comment un indicateur recueilli chez lui nourrit une politique publique », souligne Clément Mavoungou, membre de la commission économie.
Femmes : maintenir le cap de la parité
La présence féminine recule à 48 %. Emilienne Raoul, ancienne ministre de la Promotion de la femme, y voit un signal d’alerte. Elle demande d’ores et déjà aux futurs rapports d’inclure un indicateur par sexe pour chaque recommandation, afin d’inverser la tendance.
Pour la sociologue Gisèle Ngoma, invitée de la séance, la mesure va au-delà du symbolique : « Un indicateur genré oblige à évaluer l’impact réel des projets de formation, d’accès au crédit ou de santé ». Le gouvernement a salué cette vigilance constructive.
Jeunes : compétences et passerelles économiques
Le Conseil veut donner aux moins de 35 ans une place active dans la veille territoriale. Des hackathons sur l’analyse de données locales sont envisagés en lien avec des incubateurs numériques, afin de transformer les idées d’application en micro-entreprises créatrices d’emplois verts.
« Nos communes ont besoin d’outils simples pour suivre la qualité de l’air ou le prix du manioc », témoigne Junior Okou, étudiant à l’Université Marien-Ngouabi. Le CESE promet de relayer ces innovations lors des arbitrages budgétaires nationaux.
Urbanisation rapide : bâtir des villes résilientes
Avec un taux d’urbanisation supérieur à 60 %, le Congo figure parmi les champions africains de la concentration urbaine. Le CESE veut transformer ce défi en opportunité, en promouvant l’économie circulaire, les transports sobres et la gestion durable des déchets.
Les données préliminaires montrent que certaines communes consomment déjà 40 % d’électricité issue du solaire individuel. « Nous devons amplifier ces succès, en facilitant l’accès au micro-financement des installations propres », avance la commission énergie, soucieuse d’alléger la facture des ménages tout en réduisant les émissions.
Un partenariat resserré avec l’exécutif
Le Premier ministre Anatole Collinet Makosso, présent à la plénière, a assuré que « les thématiques examinées aideront les pouvoirs publics à bâtir des politiques appropriées ». Il a salué la volonté du CESE de garder ouverts les canaux de dialogue avec les ministères sectoriels.
Déjà, un calendrier de revues trimestrielles est prévu pour partager les avancées sur la protection sociale, l’intégration régionale ou la gestion des ressources naturelles, en phase avec le Plan national de développement 2022-2026.
Voix des territoires, moteur d’une croissance inclusive
Dans le département de la Sangha, les communautés riveraines des concessions forestières espèrent que le CESE portera leurs propositions de partage de revenus issus du bois et du carbone. À Pointe-Noire, les pêcheurs artisanaux veulent un quota d’accès aux zones industrielles.
Ces attentes illustrent la richesse des contributions citoyennes que l’institution souhaite canaliser. Pour Ali Boussandji, expert en participation, « un Conseil consultatif qui visite le terrain gagne en légitimité et réduit la distance entre plan national et quotidien des populations ».
Cap sur l’agenda 2063 et les ODD
Les conseillers aligneront leurs travaux sur l’Agenda 2063 de l’Union africaine et les objectifs de développement durable. Chaque note émise sera assortie d’un tableau de correspondance indiquant les cibles concernées, gage de lisibilité pour les investisseurs et bailleurs.
« La cohérence avec les cadres internationaux renforce notre capacité d’attirer des financements verts », reconnaît la commission finances. À terme, le CESE ambitionne de devenir une plateforme de données ouverte, partagée par les universités et les collectivités.
Vers un mandat de quatre ans sous le signe de la solution
En misant sur les réalités locales, la parité, la jeunesse et la résilience urbaine, le CESE pose les jalons d’une gouvernance plus inclusive. Son efficacité se mesurera à la capacité des commissions à transformer les témoignages de terrain en politiques publiques tangibles.
Les premiers bilans sont attendus lors de la session d’avril. D’ici là, les équipes sillonnent déjà routes, fleuves et forêts pour écouter, cartographier et proposer. Un mandat résolument tourné vers les solutions, au service d’un Congo durable et uni.
									 
					