Brazzaville se penche sur la CDN 2.0
Le 24 octobre 2025, Brazzaville a accueilli des experts de la société civile conviés par l’Observatoire congolais des droits de l’homme et la Rencontre pour la paix et les droits de l’homme. Objectif : examiner le projet de Contribution déterminée au niveau national, ou CDN 2.0, actuellement en révision.
Ce document-cadre, exigé tous les cinq ans par l’Accord de Paris, oriente les actions nationales contre les changements climatiques. La première version révisée en 2020 étant arrivée à expiration, le gouvernement a lancé un nouveau cycle de consultation afin de consolider ses engagements.
Les attentes de la société civile
À la tribune, la directrice exécutive de l’OCDH, Nina Cynthia Kiyindou Yombo, a rappelé que les organisations de la société civile représentent « une force » capable de repérer les failles et de proposer des pistes concrètes. Leur note de contributions constitue désormais la base des discussions techniques.
Les participants ont passé au crible chaque chapitre de la CDN 2.0, en privilégiant la transparence des données, le suivi budgétaire et l’ancrage communautaire. Ils ont insisté sur la place des femmes et des jeunes dans la gouvernance climatique, considérant ces publics comme des relais décisifs.
Financement, nerf de la guerre climatique
L’un des points jugés prioritaires concerne le financement. La mise en œuvre du précédent plan d’action a buté sur des enveloppes insuffisantes, freinant à la fois les projets d’atténuation des émissions et les mesures d’adaptation aux effets déjà ressentis du dérèglement.
Dans les recommandations, la société civile propose de définir un mécanisme clair d’allocation des fonds, avec des indicateurs simples pour mesurer l’impact au village comme à la ville. L’objectif est de rassurer les partenaires techniques et financiers et de garantir que chaque franc investit améliore réellement la résilience.
Dépasser les défis d’atténuation et d’adaptation
Selon les experts présents, plusieurs défaillances de la première CDN tenaient à l’absence de coordination intersectorielle. Les secteurs public, privé, communauté locale et société civile n’avaient pas toujours partagé leurs données ni harmonisé leurs calendriers, provoquant des doublons coûteux.
Les participants rappellent que la réussite passera par « la synergie autour de nos actions », comme l’a exprimé Mme Kiyindou Yombo. Ils préconisent d’impliquer dès la conception des projets les collectivités et les entreprises, afin de partager connaissances, calendriers et ressources humaines.
Sur le volet adaptation, la note de contributions insiste sur la prévention des inondations et des sécheresses, deux risques déjà ressentis par les communautés rurales et urbaines. Les experts estiment que des politiques cohérentes, alignées sur les réalités locales, renforceront la sécurité alimentaire et sanitaire.
Vers la COP30 : une fenêtre stratégique
La révision du document intervient à la veille de la COP30 prévue du 10 au 21 novembre 2025 à Belém. Pour la délégation congolaise, disposer d’une CDN 2.0 consolidée avant le rendez-vous international offrirait un levier diplomatique supplémentaire pour mobiliser des financements.
« Nous devons arriver à Belém avec un texte robuste et crédible », a fait valoir une représentante de RPDH en marge des débats. Selon elle, la clarté des priorités nationales facilitera les partenariats et rassurera les bailleurs qui souhaitent aligner leurs soutiens sur des plans détaillés.
Au lendemain de la réunion, les membres de la société civile ont convenu de transmettre leurs amendements formels au ministère de l’Environnement. Celui-ci devra intégrer les propositions avant de soumettre la version finale au mécanisme onusien, conformément au calendrier réglementaire.
Construire la synergie des acteurs
Le processus de consultation reste ouvert. D’autres ateliers sont envisagés pour associer plus largement les communautés locales, premières concernées par toute mesure d’atténuation ou d’adaptation. Le secteur privé sera à son tour invité afin de mutualiser compétences techniques et capacités financières.
Dans l’esprit des organisateurs, la gouvernance climatique doit sortir des cénacles experts pour entrer dans les quartiers et les villages. Informer, former et écouter sont considérés comme les prérequis à la réussite de la future CDN, dont l’efficacité dépendra de l’appropriation citoyenne.
Les acteurs présents ont évoqué la création possible d’un groupe de suivi chargé de veiller à la prise en compte des recommandations. L’idée est de maintenir la pression constructive et de garantir, sur la durée, la cohérence entre les ambitions écrites et leur traduction opérationnelle.
Pour Mme Kiyindou Yombo, la prochaine étape consistera à transformer la « force » des organisations en projets concrets, visibles sur le terrain. Elle juge indispensable que le dialogue instauré se prolonge au-delà de la ratification afin d’assurer l’évaluation permanente des engagements.
Les débats de Brazzaville témoignent ainsi de la maturité croissante de la société civile congolaise sur les questions climatiques. En travaillant main dans la main avec l’État et les autres acteurs, elle espère que la CDN 2.0 deviendra un véritable accélérateur de développement résilient.
La révision poursuit donc son cours, portée par un élan collectif que beaucoup décrivent déjà comme inédit dans l’histoire climatique nationale.
