Un futur pivot agro-industriel au cœur de Brazzaville
Annoncé il y a trois ans, le Centre multiservice de la valorisation des bio-ressources promet de devenir le nouveau poumon de l’agro-industrie congolaise. En pleine Université Marien-Ngouabi, il veut rapprocher le monde académique des réalités des champs, des marchés et des laboratoires.
La visite du 27 octobre de la ministre Delphine Edith Emmanuel a confirmé que le chantier avance à un rythme jugé satisfaisant par les partenaires. Les façades se dressent, les réseaux intérieurs se raccordent, et l’on entrevoit déjà les futures lignes pilotes de transformation alimentaire.
Travaux en phase décisive
Selon la cheffe du département, les délais ont été récemment sécurisés grâce à l’arrivée d’équipements lourds, notamment les chambres froides installées et mises sous tension. Ces modules garantiront la chaîne du froid, essentielle pour tester la conservation des fruits, tubercules et produits carnés.
Il reste néanmoins à achever les laboratoires d’analyses physico-chimiques, à câbler les salles de formation numérique et à régler les détails de ventilation. La ministre souligne que ces finitions exigent des normes précises afin d’obtenir l’accréditation internationale visée dès l’ouverture opérationnelle.
Campus, start-up et petits producteurs sous un même toit
Le CMVB ne sera pas seulement un bâtiment universitaire ; il s’imagine comme un carrefour où étudiants, start-up et coopératives rurales pourront co-concevoir des prototypes. Des espaces de co-working, un hall de micro-industrialisation et des box de stockage sont prévus pour faciliter l’incubation d’entreprises vertes.
Pour Parisse Akouango, président de l’Université Marien-Ngouabi, le centre offrira « une immersion grandeur nature aux apprenants en sciences alimentaires, moins théorique, plus interactive ». Des cursus courts de certification seront proposés, répondant aux besoins concrets des petites et moyennes entreprises agroalimentaires locales.
Un partenariat financier sous le sceau du développement durable
Le projet est financé par l’Agence française de développement via le Contrat de désendettement et de développement conclu avec l’État congolais. Ce mécanisme convertit une partie de la dette bilatérale en investissements structurants, alignés sur les objectifs nationaux de sécurité alimentaire et de diversification économique.
Antoine Chevalier rappelle que « dans un marathon, chaque kilomètre compte » et que les dernières foulées exigent coordination et transparence. La prochaine revue financière, prévue début 2024, conditionnera le décaissement final destiné à l’achat des réacteurs pilotes et des bancs d’essai sensoriels.
Réduire les pertes post-récolte et l’empreinte carbone
D’après le ministère de l’Agriculture, près de 30 % des vivres se perdent entre récolte et vente. Les chambres froides et ateliers de pasteurisation du CMVB devraient réduire ces pertes, notamment pour le manioc, la banane plantain et la pêche continentale.
Le centre intégrera des panneaux solaires et un système de récupération d’eaux pluviales. Ces dispositifs, présentés comme des vitrines pédagogiques, permettront aux étudiants de modéliser la rentabilité des équipements propres et de promouvoir des pratiques sobres en énergie dans les unités artisanales de province.
Impact attendu pour les communautés rurales
À Kinkala, Clémentine Louaka, productrice de piments, imagine déjà acheminer sa récolte vers Brazzaville pour la faire sécher et conditionner sous marque collective. « Nous pourrons accéder à un laboratoire qui rassure les grossistes d’Afrique centrale », confie-t-elle, espérant ainsi tripler ses volumes exportés.
Le ministère annonce que trente-cinq coopératives pilotes seront accompagnées la première année, via un guichet d’appui installé dans le centre. Les conseillers en innovation aideront à formuler des recettes, optimiser les emballages et négocier des micro-crédits auprès des banques partenaires.
Recherche appliquée et diplomatie scientifique
Les équipes de l’Institut national de recherche en sciences exactes préparent déjà des protocoles sur la valorisation des résidus de canne à sucre en bio-films compostables. Des partenariats sont envisagés avec l’université de Montpellier pour mutualiser équipements et données, renforçant ainsi la diplomatie scientifique sud-sud-nord.
Delphine Edith Emmanuel insiste sur l’exigence d’ouvrir le centre aux chercheurs de la sous-région. Un appel à projets transfrontaliers sera lancé dès la réception technique, afin de transformer le site en plateforme de référence pour la valorisation durable des ressources agricoles du Bassin du Congo.
Calendrier et feuille de route finale
Les ouvrages de génie civil devraient être achevés fin mars, laissant place aux essais de sécurité incendie et d’étanchéité. La formation des techniciens d’exploitation suivra en mai, tandis que les premiers lots de farine enrichie et de jus pasteurisés sont attendus pour le quatrième trimestre 2024.
D’ici là, un portail numérique doit recenser les offres de services, les tarifs indicatifs et les formulaires d’accès. Les jeunes agripreneurs pourront s’y enregistrer, réserver des créneaux machines et suivre en direct la disponibilité des laboratoires, contribuant ainsi à démocratiser la transformation alimentaire de qualité.
Informations utiles pour les futurs usagers
Le CMVB disposera d’un guichet unique situé à l’entrée nord du campus. Les agriculteurs devront présenter une carte professionnelle ou un récépissé de coopérative et payer des frais symboliques couvrant l’eau, l’électricité et le matériel consommable.
Un numéro vert sera activé, en partenariat avec l’Agence nationale du service universel. Accessible depuis les villages du Pool et des Plateaux, il orientera les producteurs vers les créneaux disponibles et indiquera les procédures de transport frigorifique subventionné.
									 
					