Des échanges au diapason des agendas climatiques
La visite de travail effectuée fin juillet à Brazzaville par Olivier Araujo, maire de Charly, illustre la montée en puissance d’une diplomatie territoriale attentive aux impératifs environnementaux. Accueilli par Pierre Ngolo, président du Sénat congolais, l’édile lyonnais a rappelé que l’assainissement constitue « un dénominateur commun de nos politiques publiques », tant en France qu’en République du Congo. L’entretien, réputé franc et constructif, a permis d’aligner les priorités opérationnelles des deux pays sur l’Objectif de développement durable 6 relatif à l’eau propre et à l’assainissement.
Dans un contexte où les villes africaines connaissent une urbanisation galopante, Brazzaville affiche la volonté de conjuguer modernisation des réseaux d’eaux usées et inclusion sociale. Les propos du président du Sénat, soulignant le rôle de la chambre haute comme force de proposition, témoignent d’une approche institutionnelle qui cherche à consolider la loi d’orientation sur le développement durable promulguée en 2019. À cet égard, l’apport technique de la commune de Charly, forte d’un savoir-faire reconnu dans la gestion intégrée des eaux pluviales, se révèle stratégique.
Enjeux partagés de l’assainissement urbain
En France, la directive-cadre européenne sur l’eau a imposé des standards stricts auxquels les collectivités se sont progressivement conformées. Charly, laboratoire d’innovations hydrauliques de l’aire métropolitaine lyonnaise, a par exemple déployé des stations de phyto-épuration et des revêtements perméables dans ses voies communales. Pour Olivier Araujo, ces solutions fondées sur la nature peuvent inspirer les aménageurs congolais, confrontés à des crues de plus en plus fréquentes dans les quartiers périphériques de Brazzaville.
La capitale congolaise, traversée par un réseau hydrographique dense, subit régulièrement des épisodes d’inondation qui fragilisent infrastructures et santé publique. Le gouvernement, appuyé par des partenaires bilatéraux, s’est engagé dans un vaste programme de curage des caniveaux et de renforcement des collecteurs principaux. L’expertise d’entreprises françaises spécialisées, invitée dans la délégation de Charly, pourrait accélérer la mise en œuvre de solutions économes en énergie et compatibles avec les réalités socio-économiques locales.
La décentralisation, levier de résilience climatique
Si l’assainissement occupe le devant de la scène, la discussion a également porté sur la décentralisation administrative, pilier de la gouvernance territoriale au Congo depuis la révision constitutionnelle de 2015. Pierre Ngolo a souligné que « le transfert progressif de compétences aux départements constitue une garantie de réactivité face aux risques climatiques ». Le constat trouve un écho immédiat en France, où les lois Defferre puis NOTRe ont montré qu’une autonomie accrue des collectivités dynamise l’ingénierie de proximité.
Olivier Araujo, fort de l’expérience hexagonale, observe que la décentralisation n’est pas un aboutissement mais un processus évolutif. À ses yeux, la création de syndicats intercommunaux au Congo, notamment dans le Pool et la Bouenza, pourrait mutualiser les moyens financiers et logistiques nécessaires à l’entretien des réseaux d’assainissement. Les deux responsables conviennent dès lors qu’une vision commune s’impose : ancrer la lutte contre le changement climatique dans les plans locaux de développement, afin de transformer chaque collectivité en acteur de résilience.
Secteur privé et collectivités, un tandem stratégique
La coopération décentralisée n’aurait que peu d’effet si elle se limitait aux échanges institutionnels. Conscients de cet enjeu, les protagonistes ont ouvert la porte à un partenariat élargi incluant entreprises, universités et organisations de la société civile. Plusieurs PME françaises, déjà engagées sur le continent, ont manifesté leur intérêt pour des co-entreprises susceptibles de produire localement des tuyaux en matériaux recyclés ou des stations modulaires de traitement des boues.
Du côté congolais, l’Agence de régulation des services d’eau potable et d’électricité a récemment actualisé son cahier des charges pour inciter à l’innovation, tandis que la Chambre de commerce et d’industrie de Brazzaville propose la création d’un guichet unique pour les investissements verts. En facilitant l’accès au foncier et à la commande publique, ces mesures pourraient réduire la facture environnementale des zones urbaines et offrir des débouchés économiques durables.
Perspectives d’une gouvernance écologique concertée
Les premiers résultats attendus de cette synergie portent sur des études de faisabilité communes, financées par l’Agence française de développement et la Banque de développement des États de l’Afrique centrale. À moyen terme, une feuille de route conjointe devrait formaliser des indicateurs de performance, notamment la diminution du taux d’eaux usées non traitées et l’accroissement de la couverture en services d’assainissement hygiénique.
Au-delà de la technique, c’est la dimension sociale qui confère à la démarche sa profondeur. La réduction des maladies hydriques, la création d’emplois locaux et la valorisation des savoirs endogènes sont autant de bénéfices attendus. « La décentralisation est un marqueur fort de développement du territoire, un levier pour hisser nos communes au rang de villes résilientes », résume Olivier Araujo. Dans le sillage de cette conviction partagée, Brazzaville et Charly tracent la voie d’une gouvernance écologique concertée, fondée sur la réciprocité, la confiance et l’anticipation des défis climatiques.