Une plateforme panafricaine inédite
Sous la chaleur de Brazzaville, la cérémonie du 3 novembre a officialisé le Réseau pour la recherche sur la transition énergétique en Afrique centrale, le ReTEAC. Derrière l’acronyme, une ambition claire : mobiliser la science au service d’une énergie propre, abordable et fiable pour la sous-région.
Un lancement salué par les autorités
Le Premier ministre, Anatole Collinet Makosso, a qualifié l’événement d’« tournant stratégique pour les deux millions de citoyens de la CEEAC » (discours du Premier ministre). Il voit dans ce réseau une réponse concrète aux difficultés d’alimentation électrique encore persistantes dans nombre de provinces.
Soutien appuyé de l’Union européenne
Entièrement financé par l’Union européenne, via son Programme de promotion des énergies renouvelables et de l’électrification rurale, le ReTEAC bénéficie aussi de l’appui technique de l’ONUDI et du Centre pour les énergies renouvelables et l’efficacité énergétique d’Afrique centrale, consolidant un partenariat multilatéral solide.
Le rôle pivot du Centre d’excellence d’Oyo
Installé dans le département de la Cuvette, le Centre d’excellence d’Oyo devient l’institution hôte du réseau. Équipement de laboratoire moderne, bancs solaires et simulateurs de réseaux hybrides y sont déjà opérationnels. Le site supervisera coordination, formations et transferts de technologies adaptées aux réalités locales.
Un cap vers une transition juste
« Nous voulons une transition juste, inclusive et tirée par nos propres chercheurs », a insisté Anatole Collinet Makosso. L’accent est mis sur la création d’emplois qualifiés, la participation des femmes et la réduction des écarts entre zones urbaines et rurales.
Des universités mobilisées
Autour de la table, les universités de Bujumbura, Douala, Bangui, Kintélé, Marien-Ngouabi, Malabo et Sao Tomé ont signé le protocole d’accord. Pour Ezéchiel Nibigira, président de la Commission de la CEEAC, « la science doit voyager librement, au-delà des frontières administratives » (allocution CEEAC).
Combler le déficit énergétique
Malgré ses vastes ressources hydrauliques, gazières et solaires, l’Afrique centrale enregistre encore un taux d’électrification moyen inférieur à 35 %. Les foyers ruraux recourent massivement au bois-énergie, accentuant la pression sur les forêts et les émissions de particules fines.
Objectifs de recherche priorisés
Le ReTEAC ciblera quatre axes : stockage décentralisé, mini-réseaux renouvelables, efficacité des appareils de cuisson propre et modèles économiques innovants. Chaque équipe devra produire au moins un prototype ou une étude de faisabilité dans les trois ans suivant le démarrage des travaux.
Renforcement des capacités locales
Des bourses de master et doctorat seront attribuées dès 2024 pour former une nouvelle génération d’ingénieurs. Le Centre d’excellence d’Oyo prévoit des cours modulaires en maintenance photovoltaïque, hydro-microscopique et gestion intelligente des réseaux, ouverts aussi aux techniciens des compagnies publiques d’électricité.
Des données pour guider l’action
Les chercheurs disposeront d’images satellitaires Sentinel et LandSat pour cartographier le potentiel solaire et repérer les zones d’extension prioritaires. Ces jeux de données seront croisés avec les enquêtes socio-économiques de l’Institut national de la statistique afin de mieux cibler les investissements futurs.
Valoriser un gisement renouvelable abondant
Le bassin du Congo reçoit en moyenne 4,5 kWh par mètre carré et par jour d’irradiation. Les chutes de la rivière Loufoulakari offrent, elles, un potentiel hydroélectrique estimé à 600 MW. La biomasse agricole, encore peu exploitée, pourrait fournir des briquettes neutres en carbone aux ménages urbains.
Intégrer jeunes et femmes
Le réseau veut atteindre 40 % de participation féminine dans ses programmes. Des clubs énergie seront ouverts dans les lycées de Brazzaville, Libreville et Yaoundé pour encourager les vocations scientifiques. Des micro-crédits faciliteront, par ailleurs, l’acquisition de kits solaires par les femmes entrepreneures rurales.
Industries vertes et compétitivité
Une meilleure stabilité électrique est jugée cruciale pour attirer des unités d’assemblage de panneaux ou de batteries. Le ministère congolais de l’Industrie espère que la recherche collaborative réduira les coûts de production et ouvrira la voie à des labels « fabriqué au Congo » dans le secteur des renouvelables.
Gouvernance partagée
Un comité scientifique, composé de dix membres élus, évaluera la progression des projets tous les six mois. Les résultats seront publiés dans un portail libre d’accès afin que décideurs, entreprises et citoyens puissent suivre l’avancement des indicateurs clés et proposer des ajustements.
Appel aux investisseurs verts
La Banque africaine de développement, la Caisse des dépôts et l’Agence française de développement ont déjà manifesté leur intérêt. Des obligations vertes régionales pourraient être émises pour financer les phases pilotes. Les retours sur investissement sont jugés attractifs, notamment dans les mini-réseaux ruraux.
Vers une électrification inclusive
Les participants ont convenu de privilégier les solutions hors-réseau pour les villages isolés, combinées à des interconnexions transfrontalières sur les grands axes économiques. L’objectif affiché est de réduire de moitié le nombre de personnes sans électricité d’ici 2030, conformément à l’Agenda 2063 de l’Union africaine.
Un élan régional à consolider
Avec le ReTEAC, l’Afrique centrale démontre que la transition énergétique peut devenir un moteur de coopération et de prospérité partagée. Reste à transformer la recherche en projets concrets. Les premiers rapports attendus fin 2024 diront si la promesse se matérialise sur le terrain.
