Une Journée pour réfléchir à l’industrie durable
Le 20 novembre, Brazzaville a résonné d’un message clair : l’Afrique ne bâtira pas sa prospérité sans des infrastructures de base solides.
Antoine Thomas Nicéphore Fylla De Saint-Eudes, ministre congolais du Développement industriel et de la Promotion du secteur privé, a profité de la Journée internationale de l’industrialisation de l’Afrique pour rappeler ce besoin urgent.
Sa déclaration inscrit le Congo-Brazzaville dans une dynamique continentale qui veut conjuguer croissance, inclusion sociale et respect de l’environnement.
Instituée en 1989 par l’Organisation de l’Unité africaine, la Journée est désormais célébrée durant une semaine entière depuis 2018, signe que l’industrialisation responsable devient un chantier prioritaire.
Objectif 9 : des fondations solides pour 2030
Le ministre a rappelé que la cible 9 des Objectifs de développement durable, qui vise des infrastructures résilientes et l’innovation, fixe une échéance claire : 2030.
Pour atteindre ce cap, il appelle à soutenir en priorité les pays les moins avancés, où le déficit d’équipements freine la compétitivité et l’accès aux services essentiels.
Investir dans les technologies de pointe et réduire les émissions de carbone vont de pair : la transition numérique ne peut se concevoir sans responsabilité climatique, insiste-t-il.
L’accès élargi au haut débit mobile est présenté comme un levier direct d’autonomisation des communautés rurales, qui peuvent ainsi développer artisanat, commerce et éducation à distance.
En zones forestières, un réseau mobile fiable facilite aussi la surveillance des incendies et la commercialisation des produits non ligneux, deux activités stratégiques pour lutter contre la déforestation.
Industrialisation et création d’emplois inclusifs
Selon le membre du gouvernement, l’essor industriel reste la condition d’une croissance soutenue et inclusive capable d’augmenter durablement le produit intérieur brut des États africains.
L’introduction d’équipements modernes et de nouvelles techniques renforce l’efficacité de la main-d’œuvre, tout en ouvrant la voie à des emplois qualifiés.
En articulant les chaînes de valeur nationales à l’industrie, les pays peuvent diversifier leurs revenus et réduire leur exposition aux prix volatils des matières premières.
Le ministre cite l’exemple des petites et moyennes entreprises de transformation agroalimentaire, dont la compétitivité grimpe dès qu’elles accèdent à l’énergie stable et à la logistique moderne.
Réduire vulnérabilité et pauvreté
La création d’emplois locaux entraîne mécaniquement une baisse de la pauvreté ; mais le ministre souligne aussi l’enjeu d’un partage équitable de la richesse produite.
Il rappelle que chaque industrie nouvelle peut hausser le niveau de vie général, pourvu qu’elle adopte dès l’origine des pratiques durables.
« Si les industries s’engagent sur la voie de la durabilité, l’effet positif sur l’environnement sera tangible », a-t-il déclaré, ouvrant la perspective d’un développement réellement inclusif.
Un retard à combler, des opportunités à saisir
Le constat demeure sévère : l’industrie africaine génère en moyenne 700 dollars de PIB par habitant, contre 2 500 dollars en Amérique latine et 3 400 en Asie de l’Est.
Cette situation se reflète dans la composition des exportations, dominées par les ressources naturelles peu ou pas transformées.
Pour l’Algérie, l’Angola ou le Nigéria, ces produits primaires représentent plus de 80 % des ventes à l’étranger, un frein manifeste à la montée en gamme.
Le ministre voit pourtant dans ce retard un gisement d’opportunités : développer des filières locales créerait de la valeur ajoutée et renforcerait la souveraineté économique du continent.
Financement vert et partenariats innovants
Pour convertir ces ambitions en projets, l’accès au financement reste décisif ; d’où l’appel aux banques africaines et aux fonds verts à concevoir des instruments adaptés aux infrastructures de proximité.
Les organisations communautaires, souvent première porte d’entrée des investisseurs, demandent plus de transparence dans la sélection des chantiers afin de garantir des retombées locales mesurables.
Le partage de risques entre État, bailleurs et acteurs privés est présenté comme une solution pour accélérer la clôture financière des projets structurants.
Une semaine d’action continentale
La Semaine de l’industrialisation de l’Afrique, organisée du 17 au 21 novembre à Kampala, a prolongé ce plaidoyer sous le thème « Transformer l’économie africaine grâce à l’industrialisation durable, l’intégration régionale et l’innovation ».
Des ateliers techniques ont exploré les convergences entre production industrielle, marché africain de libre-échange et technologies propres.
Les conclusions appellent à mutualiser les efforts des États, du secteur privé et des partenaires internationaux pour lever les obstacles financiers et logistiques.
Cap sur l’autonomisation des communautés
À Brazzaville, le ministère du Développement industriel réaffirme que la première bénéficiaire de cette ambition reste la communauté locale, du village au quartier urbain.
Routes praticables, accès à l’électricité, internet abordable : autant de prérequis sans lesquels aucune transformation industrielle ne peut prendre racine durablement.
Le ministère rappelle également l’importance de former les jeunes aux métiers techniques pour éviter que la demande en compétences ne se traduise par un recours massif à la main-d’œuvre étrangère.
« Notre principal capital est humain », martèle le ministre, invitant écoles et entreprises à nouer des partenariats afin d’aligner programmes de formation et besoins du tissu productif.
En conclusion, le gouvernement congolais assure que l’industrialisation durable, articulée à des infrastructures de base robustes, constitue un outil décisif pour atteindre les Objectifs de développement durable et renforcer l’autonomie des citoyens.
