Brazzaville respire la mobilisation
Le 7 septembre, Brazzaville a accueilli la Journée internationale de l’air pur pour un ciel bleu. À cette occasion, la ministre de l’Environnement, du Développement durable et du Bassin du Congo, Arlette Soudan-Nonault, a présenté la feuille de route nationale contre la pollution atmosphérique.
Devant représentants communautaires, transporteurs et industriels, elle a rappelé que l’air n’est pas une ressource illimitée. « Nous devons agir », a-t-elle insisté, posant le cadre d’une politique considérée prioritaire par le gouvernement pour protéger la santé et soutenir un développement durable équilibré.
Une menace sanitaire chiffrée
Le gouvernement évalue à un million et demi le nombre de décès annuels causés par l’air vicié sur le continent africain, un bilan plus lourd que l’alcool, le tabac et les accidents routiers réunis, précise la déclaration officielle lue lors de la cérémonie.
Au Congo, plus de soixante pour cent des habitants de Brazzaville et Pointe-Noire respirent quotidiennement des vapeurs toxiques. Cette exposition chronique accroît le taux de mortalité et met à l’épreuve les services de santé, déjà mobilisés sur d’autres fronts sanitaires.
Des sanctions administratives et pénales
Afin d’enrayer la tendance, Arlette Soudan-Nonault a annoncé l’application de sanctions immédiates contre les « agents vecteurs » de pollution. Elle vise aussi bien l’industriel dont la cheminée enfume un quartier que le propriétaire de taxi ou de camion dont le pot d’échappement crache un nuage opaque.
Une fois l’infraction constatée, des procédures administratives seront déclenchées, complétées, si nécessaire, par des poursuites pénales. La ministre insiste sur l’exemplarité espérée de ces mesures : « personne ne doit plus considérer la pollution comme un coût acceptable du progrès ».
Des sources multiples d’émissions
Les villes du pays, explique le ministère, « suffoquent » sous les fumées de véhicules d’occasion importés, de minibus bondés et de poids lourds vieillissants. À cela s’ajoutent les tas d’ordures qui se consument dans les rues et des méthodes de cuisson au bois encore très répandues.
Ces pratiques, parfois tolérées par habitude, cumulent oxydes d’azote, particules fines et composés organiques volatils. Les riverains évoquent des démangeaisons oculaires, des toux récurrentes et une fatigue tenace, symptômes que les professionnels de santé relient directement à la qualité fluctuante de l’air urbain.
Vers un réseau national de surveillance
Pour éclairer l’action publique, le gouvernement prévoit la création prochaine d’une Agence nationale de l’environnement. L’institution aura la charge d’installer des stations de mesure, de publier des bulletins quotidiens et de déclencher une alarme précoce en cas de dépassement critique.
Cet outil devrait également centraliser les données issues des capteurs des partenaires internationaux. Les cartes de pollution qui en découleront permettront aux élus locaux d’ajuster plans de circulation, zones vertes ou horaires de collecte des déchets, selon l’intensité des pics.
Mobiliser citoyens et transporteurs
La déclaration ministérielle souligne que la réussite dépendra de l’adhésion populaire. Elle invite les propriétaires de véhicules à entretenir moteurs et filtres, et encourage les ménages à privilégier des modes de cuisson moins fumigènes afin de réduire la pression sur l’atmosphère commune.
Plusieurs syndicats de transport ont salué la clarté des annonces, tout en demandant un calendrier progressif d’application. « Nous voulons participer, mais nos flottes sont anciennes ; il faut des solutions financières adaptées », explique un responsable d’une coopérative de taxis, interrogé à la sortie de la cérémonie.
Du côté des associations de quartier, la priorité est la sensibilisation. Des bénévoles envisagent des tournées d’information pour rappeler l’interdiction de brûler les déchets en plein air et orienter les familles vers les points de collecte autorisés.
Encadré pratique : qui contacter en cas d’infraction
Le ministère a mis à disposition une ligne verte gratuite accessible depuis l’ensemble du territoire. Les citoyens peuvent y signaler fumées suspectes, dépôts sauvages ou véhicules hors normes, en mentionnant lieu, heure et, si possible, photographie de l’incident.
Les services municipaux disposent également d’un numéro dédié pour organiser l’enlèvement rapide des ordures combustibles. Selon la mairie de Brazzaville, la réactivité ne doit pas dépasser vingt-quatre heures afin d’éviter que les déchets ne soient allumés par inadvertance.
Enfin, le futur réseau de stations diffusera des indices de qualité de l’air sur les radios communautaires. Chacun pourra anticiper ses déplacements, protéger les personnes sensibles et, surtout, mesurer l’impact des efforts collectifs dans la durée.
Ancrage dans l’agenda international
La feuille de route congolaise s’inscrit dans l’engagement pris à Rio+20 et rappelé par le Programme de développement durable à l’horizon 2030. Réduire la pollution atmosphérique apparaît comme une condition incontournable pour avancer vers les dix-sept objectifs mondiaux, notamment santé, climat et villes durables.
Le thème « Ensemble pour un air pur », retenu cette année par l’Assemblée générale des Nations unies, résonne avec l’approche collaborative promue à Brazzaville. La réponse ne peut, répète la ministre, venir d’un seul acteur ; elle doit rassembler État, secteur privé et communautés locales.
Le message entendu le 7 septembre est clair : assurer un ciel bleu ne relève plus du vœu pieu, mais d’une responsabilité partagée entre institutions, entreprises et citoyens. Les sanctions annoncées se veulent un levier, la transparence des données un second, pour replacer l’air pur au cœur du quotidien.