Nguya FLNG propulse le Congo LNG
Sous les banderoles rouges du chantier naval de Shanghai, l’unité flottante de liquéfaction de gaz Nguya a reçu, fin août 2025, le salut officiel qui marque son départ vers la concession Marine XII, emblème du programme Congo LNG piloté par Eni.
Longue de 376 mètres pour 60 mètres de large, la plateforme pourra produire 2,4 millions de tonnes de GNL par an, suffisamment pour tripler la capacité actuelle du pays et sécuriser de nouveaux débouchés régionaux tout en consolidant la sécurité énergétique nationale.
Le ministre congolais des Hydrocarbures, Bruno Jean Richard Itoua, s’est félicité « d’un pas supplémentaire vers la valorisation durable de nos ressources gazières », saluant une coopération public-privé qu’il juge exemplaire pour l’industrialisation raisonnée du littoral (discours, 26 août 2025).
Record de construction et technologies sobres
Dès l’attribution du contrat, les ingénieurs ont travaillé jour et nuit : seulement 33 mois séparent la signature des plans de la mise à l’eau, établissant une référence de rapidité dans l’univers du GNL offshore, selon Stefano Maione, directeur Développement d’Eni.
L’unité intègre des turbines haut rendement et un système de récupération de chaleur qui devraient réduire de 30 % les émissions de CO₂ par tonne liquéfiée par rapport aux procédés classiques, un argument clé pour les institutions financières attentives aux critères ESG.
Grâce à sa capacité modulable, Nguya pourra traiter les flux de plusieurs gisements, y compris les découvertes émergentes du permis Marine XII, rendant l’ensemble du dispositif plus résilient face aux fluctuations de production et à l’évolution des marchés internationaux.
Scarabeo 5, le recyclage industriel en action
À quelques encablures, la plateforme Scarabeo 5, ex-navire de forage transformé en unité de production et de compression, finira ses tests avant de rejoindre le champ. Son rôle : pré-traiter le gaz et l’acheminer, via un flexible, vers Nguya.
Cette opération de surcyclage industriel a permis d’économiser près de deux ans de construction neuve, de contenir les coûts et d’éviter environ 40 000 tonnes de nouvelles émissions de matériaux, selon les calculs préliminaires fournis par le chantier chinois.
« Nous démontrons qu’une plateforme peut connaître plusieurs vies et contribuer encore à la transition », souligne un ingénieur congolais impliqué dans le retrofit, fier de partager un savoir-faire qu’il décrit comme un levier d’emploi qualifié pour la jeunesse locale.
Calendrier 2025 tenu, infrastructures sous-marines prêtes
Sous l’eau, 120 kilomètres de conduites flexibles et de câbles d’alimentation sont déjà posés entre les réservoirs et la côte. Les robots submersibles terminent l’installation des collecteurs, une étape décisive avant l’amarrage de l’unité Nguya prévu au quatrième trimestre 2025.
Tango FLNG, mis en service fin 2023, a expédié sa douzième cargaison, validant la chaîne logistique du projet. L’arrivée de Nguya portera la capacité combinée à 3 millions de tonnes par an, seuil qui place le Congo parmi les acteurs émergents du GNL africain.
ENI précise que 70 % du gaz alimentera la centrale électrique du Congo à Pointe-Noire, sécurisant l’approvisionnement intérieur tout en dégageant un excédent exportable susceptible de soutenir les recettes publiques sans compromettre l’accès local à l’énergie.
Retombées locales : emplois, énergie, progrès social
Au pic du chantier, plus de 2 500 techniciens congolais et étrangers œuvreront simultanément, selon le ministère du Travail. Des partenariats avec l’Institut national du pétrole offrent déjà des formations en soudure cryogénique et en maintenance automatisée, compétences rares sur le continent.
Les communes riveraines espèrent aussi tirer parti des chantiers d’adduction d’eau et de réhabilitation de dispensaires financés via le fonds social du projet. À Moanda, des forages pilotes fournissent de l’eau potable à 8 000 habitants depuis juin 2024, réduisant les maladies hydriques.
Plus largement, l’État prévoit d’affecter une partie des revenus additionnels au programme national d’électrification rurale, qui vise à connecter 300 villages d’ici 2030. Les experts estiment que la disponibilité d’un gaz domestique compétitif facilitera l’hybridation solaire-gaz des mini-réseaux.
Gaz, énergies renouvelables et futur bas carbone
Si le gaz reste une énergie fossile, plusieurs observateurs le présentent comme un « pont » vers un bouquet bas carbone. Le gouvernement mise sur cet atout pour financer, à moyen terme, l’essor de l’hydroélectricité et du solaire, conformément au Plan national climat.
Les investisseurs internationaux, rassurés par la trajectoire ESG d’Eni et le contexte réglementaire stable, ont déjà souscrit 800 millions de dollars de financements verts liés aux performances de réduction d’émissions du projet. Un signal encourageant pour d’autres infrastructures à faible intensité carbone sur le sol congolais.
Avec Nguya FLNG, le bassin côtier congolais s’inscrit ainsi dans la carte mondiale du gaz liquéfié, tout en affirmant une stratégie qui associe compétitivité, responsabilité sociale et perspectives de transition énergétique au profit des générations futures.