Pointe-Noire entre pluies diluviennes et vulnérabilité urbaine
Lorsque les premières averses tropicales s’abattent sur la côte atlantique, les artères de Pointe-Noire se transforment en véritables confluents débordants. La métropole économique du Congo-Brazzaville vit depuis plusieurs années sous la menace d’inondations dont la fréquence et l’intensité exacerbent les fragilités socio-spatiales. Chefs de quartiers, opérateurs portuaires et institutions internationales s’accordent désormais sur un diagnostic partagé : la résilience hydrique de la ville conditionne sa compétitivité comme sa cohésion sociale.
Un agenda gouvernemental recentré sur la résilience
Les autorités nationales ont inscrit cette problématique au cœur de l’Agenda 2022-2026, articulant les volets assainissement, voirie et inclusion sociale. Le Comité d’orientation et de suivi, réuni le 10 juillet à Brazzaville, a réaffirmé la nécessité d’accélérer la mobilisation de ressources destinées à la finalisation des ouvrages programmés. Dans une formulation empreinte de volontarisme, les membres du Cos ont demandé au ministère des Finances, du Budget et du Portefeuille public de « multiplier les passerelles avec les partenaires techniques et financiers » afin de combler les écarts de financement identifiés.
Le Contrat d’endettement-développement, levier structurant
Véritable colonne vertébrale de la coopération franco-congolaise, le C2D irrigue déjà plusieurs chantiers stratégiques : réhabilitation des axes routiers, électrification péri-urbaine ou encore modernisation hospitalière. Dans le cas spécifique de Pointe-Noire, il constitue la principale source de subventions pour des systèmes de drainage urbain conçus afin d’absorber des crues décennales. Le Cos a ainsi appelé à une clôture rapide du portefeuille énergie du C2D et à un réacheminement des reliquats vers les opérations Telema, plateforme numérique d’inclusion socio-économique dont l’extension est perçue comme un gage d’acceptabilité sociale des travaux.
Finances publiques : de la soutenabilité à l’efficience
Sur le plan budgétaire, l’enjeu central n’est plus uniquement le volume des décaissements, mais la capacité à garantir une programmation pluriannuelle des dépenses d’entretien. Les experts rappellent qu’une voirie mal entretenue peut perdre jusqu’à 40 % de sa valeur fonctionnelle en cinq ans. Le Cos a donc invité les ministères sectoriels à formuler, d’ici la prochaine loi de finances, des requêtes détaillées couvrant fonctionnement, maintenance et renouvellement partiel des équipements. Cette approche par cycle de vie s’inscrit dans le sillage des standards de la Banque africaine de développement, régulièrement cités en référence.
Gouvernance et transparence : un suivi bilatéral renforcé
Conscient des impératifs de redevabilité, le Comité technique bilatéral du C2D sera désormais informé chaque trimestre des décaissements intermédiaires réalisés. Cette cadence vise à réduire l’asymétrie d’information entre bailleurs et bénéficiaires, tout en maintenant la pression sur les délais d’exécution. Plusieurs observateurs estiment que cette démarche participera à consolider la confiance des marchés et à améliorer la notation de risque-pays, élément clé dans la renégociation prochaine de certains emprunts souverains.
Communication stratégique : fabriquer le consentement urbain
Parce qu’aucun projet d’infrastructure n’échappe au verdict social, le Cos a également missionné une agence spécialisée pour activer le plan de communication de la route de la Corniche et, d’ici fin 2025, ceux afférents aux programmes Ames, Mosala, Telema, Parsa et Ppfnc. L’objectif est double : valoriser les externalités positives – réduction des temps de trajet, amélioration de la salubrité – et prévenir les résistances communautaires liées aux expropriations. À terme, un narratif cohérent doit permettre d’ancrer la culture de l’entretien collectif dans les mentalités.
Vers une ville portuaire durable et compétitive
Ces orientations témoignent d’une volonté croissante d’inscrire Pointe-Noire dans le cercle vertueux de la durabilité urbaine. Soutenu par un cadre macroéconomique stabilisé et une diplomatie économique proactive, le ministère des Finances explore déjà des instruments innovants, tels que les obligations vertes indexées sur la performance environnementale. Si la matérialisation de ces pistes dépendra de la conjoncture internationale, elle illustre néanmoins un changement de paradigme : l’assainissement n’est plus un poste de dépense, mais un investissement stratégique susceptible de générer du capital social, économique et politique.
Cap sur l’exécution et la pérennisation
À l’orée de la prochaine saison des pluies, l’équation reste toutefois exigeante : traduire la feuille de route financière en chantiers tangibles, tout en sécurisant les ressources nécessaires à leur entretien. Les signaux envoyés par le Cos laissent entrevoir une dynamique constructive entre État, partenaires internationaux et société civile. Sous réserve d’une gouvernance résolument orientée vers la performance, Pointe-Noire pourrait à brève échéance convertir ses « torrents d’espoir » en réseaux d’assainissement opérationnels, offrant à ses habitants un environnement plus sûr et à ses investisseurs une plateforme logistique résiliente.