Trente-et-un nouveaux défenseurs de l’environnement
Sous le ciel encore brumeux de Brazzaville, la cérémonie du 9 octobre a donné le ton : le Congo-Brazzaville se dote d’une première promotion de 31 inspecteurs verts, assermentés et dûment habilités à faire appliquer les textes sur la protection de la nature.
En recevant leurs attestations, ces femmes et hommes ont levé la main droite et prononcé un engagement solennel. « Nous servirons avec rigueur et loyauté pour bâtir un avenir plus sain », a déclaré leur porte-parole Schiller Sen Mbedi Mouanda devant leurs familles venues partager l’instant.
Une formation alignée sur la stratégie nationale
Durant plusieurs semaines, les stagiaires ont alterné cours en salle et sorties de terrain. Droit de l’environnement, procédures de contrôle, premiers secours, géolocalisation et techniques d’échantillonnage d’eau figuraient au programme, conçu avec le concours de juristes, policiers et forestiers.
Selon la ministre de l’Environnement, du Développement durable et du Bassin du Congo, Arlette Soudan-Nonault, cette montée en compétences traduit la vision écologique globale prônée par le chef de l’État : « Chaque territoire aura bientôt des relais capables d’anticiper les risques et de dialoguer avec la population », a-t-elle indiqué.
Les apprenants ont aussi travaillé sur des études de cas inspirées des districts voisins : brulis non maîtrisés dans le Pool, pollution pétrolière à Pointe-Noire, rejets industriels le long de la Tsiémé. À chaque fois, ils ont dû proposer un plan d’action réaliste et budgété.
De nouveaux pouvoirs pour appliquer la loi
Le statut d’agent assermenté leur confère la faculté de constater les infractions, dresser procès-verbaux, suspendre une activité polluante et saisir la justice. Jusqu’ici, ces tâches incombaient souvent à des services débordés, ralentissant la chaîne de sanction.
« Nous ne sommes pas là pour punir à tout prix, mais pour prévenir », explique Nadège Tchicaya, géologue de formation et benjamine de la promotion. Sur un dépôt sauvage, elle pourra désormais exiger un plan de remise en état et suivre l’exécution jusqu’à la dernière brouette.
Le garde-fou reste la déontologie. La ministre a rappelé que l’impartialité n’est pas négociable. Tout abus sera sanctionné, car la crédibilité d’une administration verte dépend de la confiance qu’elle inspire aux citoyens et aux investisseurs responsables.
Écouter et servir les territoires
Dans le quartier périphérique de Djiri, la cheffe de quartier Marie-Claire Ngoma se réjouit : « Nous alertons souvent sur la fumée des fours à charbon. Savoir qu’un inspecteur viendra constater, c’est rassurant. » Les agents nouvellement formés ont pour consigne de tenir des permanences itinérantes.
Ils devront aussi consolider les données manquantes. Un simple relevé journalier des eaux usées peut sauver une rizière en aval. Les informations collectées alimenteront le Système national d’information environnementale, encore lacunaire sur certaines zones rurales.
Pour les ONG, l’enjeu est de co-construire. Jean Mabiala de l’association Jurec estime que « l’arrivée d’agents outillés crée de nouveaux espaces de concertation plutôt que de confrontation ». Des ateliers seront organisés afin d’harmoniser procédures et calendriers de contrôle.
Prochaines étapes pour la garde verte
À court terme, les 31 inspecteurs seront déployés dans six directions départementales jugées prioritaires, avant qu’une deuxième cohorte de 50 stagiaires ne commence la formation début 2024 selon le calendrier provisoire du ministère.
Le financement s’appuie sur le budget national et un partenariat avec le Fonds vert pour le climat. Une enveloppe est réservée pour des kits mobiles : tablettes durcies, capteurs de qualité de l’air, drones légers pour repérer les décharges dans les zones enclavées.
Au-delà des chiffres, la symbolique est forte. Elle rappelle que la protection de l’environnement n’est pas seulement l’affaire des chancelleries ou des conférences internationales, mais un service public de proximité. « La nature congolaise est notre patrimoine commun », martèle Arlette Soudan-Nonault.
Pour clôturer la cérémonie, les nouveaux agents ont planté un jeune terminalia superba sur l’esplanade du ministère, geste simple mais porteur d’un message : désormais, la loi et la terre avancent main dans la main au Congo-Brazzaville.
